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L'Équipe
08-08-2025
- Science
- L'Équipe
La maladie de Lyme, « une des premières maladies infectieuses en France » : la tique, hantise des randonneurs et des sportifs en pleine nature
Hugues Gascan, directeur de recherche au CNRS, spécialiste de la maladie de Lyme, réagit au calvaire de Xavier Thévenard. Et de nombreux autres malades... Directeur de recherche au CNRS et membre du Conseil scientifique de la Fédération française contre les maladies vectorielles à tiques (FFMVT), Hugues Gascan est un des meilleurs spécialistes français de la borréliose de Lyme. Interrogé par L'Équipe, il réagit au calvaire de Xavier Thévenard, raconte le parcours du combattant des malades, les progrès de la médecine dans sa compréhension de la maladie, mais aussi le regrettable retard pris par la science. Il appelle enfin à se méfier de certains traitements et certaines cliniques, à la limite du charlatanisme. « Le trailer Xavier Thévenard nous explique avoir disparu des courses après avoir contracté une forme longue de la borréliose de Lyme. Que sait-on de cette maladie ?Lorsqu'on est piqué par une tique, il y a deux cas de figure. Dans 85 % des cas, se crée un anneau inflammatoire que l'on appelle érythème migrant. Le patient reconnaît la bactérie, se défend et va faire une réponse immunitaire. Le traitement classique consiste alors en une cure d'antibiotiques de deux semaines. Mais chez un petit pourcentage de patients, il peut arriver qu'il y ait une rechute. Il arrive aussi que des symptômes inauguraux apparaissent six mois, un an, trois ans après chez des personnes pour lesquelles la piqûre n'avait pas induit d'anneau inflammatoire. Les problèmes peuvent alors être très complexes. Où est passé Xavier Thévenard, le petit prince du trail atteint de la maladie de Lyme ? De quels symptômes parle-t-on ?Il y a une triade de symptômes minimale : des douleurs articulaires généralisées, une fatigue désocialisante, avec des gens qui ne peuvent plus grimper deux étages sans prendre dix minutes de repos, et d'autres qui sont complètement alités, comme c'est arrivé pour un de mes proches. La maladie peut générer des troubles cognitifs, un brouillard cérébral, des difficultés à se concentrer sur la mémoire immédiate. Vous lisez un paragraphe, et au bout de la cinquième ligne, vous avez oublié le sens de la première. La grande controverse a été liée au fait que cette forme qui apparaît complexe dans la durée n'était pas reconnue par les autorités de médecine conventionnelles. Et c'est le cas désormais ?Certaines associations, parfois très virulentes, se sont élevées contre ça. En février 2025, la Haute autorité de santé (HAS) a reconnu la seconde forme comme étant une réalité. On a été beaucoup aidé par la Covid, avec les Covid longs qui ont exactement le même tableau clinique : fatigue chronique, douleurs articulaires et brouillard cérébral. La forme longue de la maladie de Lyme a donc été reconnue, une forme que j'appellerais chronique. Ce n'est pas le terme retenu par la HAS, mais ça parle à tout le monde. « On est embêtés car on ne connaît pas de marqueurs biologiques. » Qu'est-ce qui cause cette maladie chronique ?On en sait trop rien ! On est embêtés car on ne connaît pas de marqueurs biologiques. On peut faire toutes les prises de sang que vous voulez, on ne trouve quasiment rien. Sauf que ces patients souffrent : ils sont hypercrevés. Certains médecins parlent de syndromes post-infectieux. Il y a plusieurs hypothèses. Selon la première d'entre elles, largement répandue, les pathogènes restent dans l'organisme à très faible densité. La Borrelia (une bactérie), dans des circonstances un peu drastiques, a tendance à ne plus bouger, et à se multiplier toutes les deux, trois, quatre semaines, et peut rester cachée dans le cerveau pendant longtemps. L'autre possibilité, c'est celle d'une destruction de la maladie par antibiotiques, mais des fantômes de structure de la Borrelia, comme de protéines ou des lipides, donneraient chez le patient des réponses inflammatoires, voire auto-immunes. Pourquoi pas ? Mais nous avons peu de preuves dans ce sens-là, car nous ne constatons pas de grosses inflammations dans les formes chroniques. La troisième hypothèse, c'est celle d'une bactérie à bas bruit qui induirait une immunodépression. En clair, le corps jetterait un peu l'éponge et tolérerait la maladie dans son organisme, maintenant l'humain un peu malade par ailleurs. La quatrième hypothèse, à laquelle je n'adhère pas, c'est le scénario psychologique, un contrecoup dans l'esprit des malades. Cette hypothèse tend à disparaître, notamment quand on a constaté l'émergence de formes longues de Covid. Sans connaître exactement son fonctionnement, peut-on soigner la maladie ?La prise de conscience a pris énormément de retard. La maladie de Lyme a été peu ou prou découverte à la même époque que le SIDA. Dès 87 ou 88, des études sont publiées pour planter tout le décor que je viens de vous expliquer. Mais peu de choses ont bougé depuis. Le milieu de l'infection bactérienne n'a pas pris les choses au sérieux et a pris un retard colossal. Aujourd'hui, la prise de conscience est faite, et des budgets commencent à être débloqués pour la recherche. Quels médicaments fonctionnent ?Il y a une forte variabilité individuelle, certains patients répondent bien aux traitements, d'autre peu, et se laissent alors tenter par les miroirs aux alouettes. Il y a le traitement conventionnel composé d'une ou deux cures d'antibiotiques, la doxycycline, avec une troisième possible, dans un contexte hospitalier. Il y a aussi un antibio exceptionnel, la Rocéphine (ceftriaxone), qui est une sorte de super pénicilline injectable. Cela consiste en des injections quotidiennes pendant deux à quatre semaines selon la gravité. Et là, ça a un effet boeuf lors de la première cure. Pendant deux mois environ, la forme revient. Sauf que chez de nombreux patients, cela ne dure pas. Une seconde cure de ceftriaxone est parfois tentée, soit ça remarche une deuxième fois, soit ça ne marche plus. C'est transitoire. La bactérie semble alors s'habituer et échapper au traitement. « Il y a une zone grise, c'est la phytothérapie. » On en vient alors à la situation décrite par Xavier Thévenard, cette sorte de course lancée pour trouver le bon protocole, celui par lequel on se sentira enfin y a une zone grise, c'est la phytothérapie. Des extraits de plantes aromatiques notamment peuvent présenter un bénéfice, je ne jette pas tout. Ce n'est pas un traitement reconnu, mais le principe est qu'une association de plantes peut, chez certains patients, prendre le relais des antibiotiques. On peut espérer que la maladie s'use au bout d'un certain nombre d'années, et que les patients retrouvent de l'autonomie. Après il y a ces cliniques miraculeuses qui proposent de la naturopathie, des micronutriments, des soins parfois spirituels associant le corps et l'esprit etc., l'hyperthermie, des traitements à base d'oxygène, de la luminothérapie et des champs magnétiques - là je ne vois pas trop... -, et on entre dans toutes sortes de déviances, de poudres de perlimpinpin. Que penser de tout ça ? C'est assez illusoire, cela relève généralement de la case escroquerie. Il y a aussi des cliniques qui proposent un panachage (avec une combinaison de ceftriaxone et de traitements naturels) en Suisse, en Allemagne, en Belgique, ou que sais-je encore ? Le patient repartira effectivement au bout de deux semaines et se sentira beaucoup mieux. Mais s'il avait bénéficié de la même cure avec injection de ceftriaxone en hôpital, le résultat aurait été identique, et il n'y aurait pas laissé un bras... Pour le reste, au-delà du traitement antibiotique, c'est de l'habillage, du packaging, bref du business. « On a l'image d'Epinal de la tique qui fait la taille de l'extrémité de notre doigt. Mais ça, c'est la version adulte du parasite, gorgée de sang. » Les tiques sont le cauchemar de tous les randonneurs et sportifs qui exercent leur passion dans la nature. Connaît-on l'étendue de la maladie ?On a l'image d'Épinal de la tique qui fait la taille de l'extrémité de notre doigt. Mais ça, c'est la version adulte du parasite, gorgée de sang. La forme juvénile, ou nymphe, fait moins d'un millimètre de diamètre. Elle recherche le cuir chevelu, derrière les oreilles, l'entrejambe, beaucoup de gens ne voient ni le parasite, ni même la piqûre. Cela contribue à sous-estimer la maladie. Au bout de deux - trois jours, la tique, repue, se détache d'elle-même. Soit on voit l'anneau inflammatoire centré sur la piqûre, soit on ne le voit pas, c'est un peu la roulette russe. Après une balade en forêt il faudrait dès le soir ou lendemain, s'inspecter tout le corps en détail, ce qui peut s'avérer contraignant. Ou bien imprégner ses vêtements de répulsifs anti-tiques avant les sorties en nature. Arnaud De Lie (Lotto) diagnostiqué avec la maladie de Lyme Que faire, alors ?C'est un gros problème : la maladie chronique n'était pas reconnue pendant longtemps, et les études manquent. Certains généralistes mettent les patients sous antibiotiques pendant un an, un an et demi. En France, c'est interdit. Des essais cliniques menés sur deux ou trois mois n'ont pas donné de résultats très clairs. Aux États-Unis, à Boston, dans le Massachusetts, les chercheurs et les associations de patients ont, dès 2012, fait passer une loi au niveau de l'État : tant qu'il y a un bénéfice avéré pour le patient, le médecin peut continuer à prescrire des antibiotiques. Cette loi-là a fait tache d'huile dans tous les États où la maladie de Lyme est endémique. Elle est aujourd'hui déclinée et appliquée dans une douzaine d'États américains. Selon les statistiques de Santé Publique France, entre 50 000 et 70 000 personnes se font piquer chaque année, en fonction des taux d'humidité et de la chaleur. Cela en fait donc une des premières maladies infectieuses en France. »
L'Équipe
08-08-2025
- Sport
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Xavier Thévenard, l'ex petit prince du trail engagé dans une course de fond contre la maladie de Lyme
Triple vainqueur de l'UTMB, Xavier Thévenard a disparu des radars depuis quatre ans et une ultime participation à l'Ultra Trail du Mont-Blanc en août 2021. La faute à une maladie de Lyme qu'il combat depuis des années. La silhouette de ce petit bonhomme qui court, se délecte des pentes, oublie les heures comme on oublie les jours de canicule, a disparu du circuit depuis le 31 août 2021. Ce jour-là, Xavier Thévenard abandonne l'UTMB au kilomètre 50, au niveau des Chapieux. Il n'a plus de souffle, est à bout de forces. Un crève-coeur pour cette légende de l'ultra-trail, et plus particulièrement de l'UTMB, dont il a marqué l'histoire. Il est le seul coureur à avoir réalisé le Grand Chelem en gagnant les quatre courses individuelles : la distance reine (environ 170 km), remportée à trois reprises (2013, 2015 et 2018 - seul François D'Haene a fait mieux, quatre victoires), la CCC (99 km) en 2010, la TDS (119 km) en 2014, et l'OCC (55 km) en 2016. « Ça me fait un pincement au coeur quand je reviens à Chamonix et que je ne peux plus participer à cause de mon état de santé », reconnaît-il aujourd'hui. Deux mois plus tôt, en juin 2021, le petit prince du trail (1,70 m) avait aussi été contraint de renoncer après 33 kilomètres à la Sportiva Lavaredo (120 km, 5 800 m de D +). « Dès le début de course, j'ai eu des soucis à respirer correctement, avec des sensations de crises d'asthme, écrit-il alors sur son compte Facebook. Mon énergie s'est dégradée au fil des kilomètres pour me pousser à abandonner. La déception est grande mais ma santé est ma priorité. J'espère en savoir plus la semaine prochaine en faisant des examens de santé à mon retour en France... » Il se savait déjà atteint. Tapie dans l'ombre, la maladie de Lyme le rongeait de l'intérieur. « J'ai ressenti les premiers symptômes à la fin de l'année 2019 , nous explique Thévenard, 37 ans. Mon état de santé s'est dégradé au fur et à mesure (...) Je fatiguais très vite, j'avais une perte de force dans les jambes, je voyais flou, j'avais des picotements dans la poitrine. Je perdais aussi le fil de la conversation. C'était impossible de me concentrer. Je me suis dit qu'il y avait un truc qui clochait. » Il passera des examens, et restera coi : il souffre de la maladie de Lyme. Pas d'érythème migrant, cette rougeur révélatrice autour de la piqûre, souvent indolore mais plus bavarde que mille examens. Selon l'institut Pasteur, « il s'agit de la manifestation la plus fréquente (environ 80 % des cas) » de l'infection. Avec elle, un traitement antibiotique rapide suffit souvent. Mais lui n'a rien vu. Pas un signe. Juste le corps qui trahit, sans sommation. « Je n'ai absolument aucune idée du moment où j'ai été contaminé. C'est d'ailleurs assez sournois comme maladie, on peut déclencher les symptômes des années après la piqûre. » L'histoire de Thévenard trotte dans la tête des autres coureurs, comme Ludovic Pommeret (50 ans, vainqueur de l'UTMB en 2016), qui confie : « J'y pense toujours et je surveille les tiques le soir quand on est dans des milieux à risque. C'est une alerte pour toutes et tous ! » « Je n'ai pas eu envie de m'étaler sur le sujet parce que je ne voulais pas me plaindre. » Xavier Thévenard Pour Thévenard, habitué à jouer avec ses limites, cette maladie fut d'abord un séisme sans bruit. Lui qui déclarait en 2016 : « Je suis presque toujours facile. Quand je souffre, je n'y pense pas. Ça brûle, oui, mais je me fais "plaiz". C'est intrigant de savoir jusqu'où tu peux aller. Moi, je suis content quand je suis bien fatigué. » Et voilà qu'un ennemi invisible venait lui apprendre une souffrance nouvelle. Il a commencé par nier. Comment croire qu'un corps dressé à avaler les montagnes puisse céder à une morsure de tique ? À l'époque, l'athlète continue à s'entraîner, persuadé que la fatigue est un territoire qu'il connaît trop pour s'y perdre. Il regrette aujourd'hui ce moment où il pouvait courir des heures sans souffrir. Quand il apprend qu'il est malade, il garde le silence. Pas par orgueil. Par pudeur. « Je n'ai pas eu envie de m'étaler sur le sujet parce que je ne voulais pas me plaindre. » Il commence son traitement en octobre 2020. Antibiotiques. Amoxicilline. Le protocole classique. Mais rien ne cède. « Mon état de santé s'est amélioré avec les premiers traitements mais je rechutais régulièrement. La borréliose de Lyme s'était installée dans mon corps et est devenue chronique. » Une chute aux enfers Impossible de continuer à courir dans cet état. Les jambes ne veulent plus. Le souffle s'efface. « C'était un peu la chute aux enfers. » Alors il met sa carrière entre parenthèses. Une pause, pas un arrêt définitif. En 2022, pour l'UTMB, on l'attend. Il ne viendra pas. Le corps refuse toujours. En 2023, il espère y effectuer son retour. Il renonce. « Sa présence manque dans le milieu dans l'ultra-trail, reconnaît Pommeret. On sait très bien qu'il y a forcément un peu d'oubli quand on est éloigné du circuit, on est vite remplacé. Mais on est dans la discipline depuis longtemps, on se souvient forcément de ses performances. » Thévenard, lui, s'en accommode. « Ça n'a jamais été mon but d'être mis en avant. » Pas de statue, pas de projecteurs : il se contente d'un sentier en montagne. Mais très vite, cela ne lui suffit plus. Pommeret : « Au début, Xavier ne voulait pas se soigner avec des médicaments trop agressifs. Il a dû changer d'avis car ça traînait en longueur. » Thévenard abandonne les antibiotiques en 2021, un an et demi après le début de son traitement. « Il s'est soigné aux huiles essentielles », dit-on dans le milieu. Il a surtout suivi le processus médical français, que le Professeur Pierre Tattevin, spécialiste en maladies infectieuses au Centre hospitalier universitaire de Rennes, nous partage : « Le traitement des formes articulaires repose sur la doxycycline, la ceftriaxone ou l'amoxicilline pendant 28 jours. En cas de symptômes persistants après une borréliose de Lyme bien traitée, il est recommandé de ne pas répéter ou prolonger l'antibiothérapie. » Thévenard s'en explique : « Je prenais le traitement conventionnel mais mon état de santé n'évoluait pas. Ce n'est pas anodin non plus de prendre un antibiotique. Ce n'est pas un médicament qui te met en forme. D'autant que la bactérie s'adapte et développe une résistance. J'ai donc tenté tout ce qui est naturel. » 2023 fut pour lui « la pire année » de sa vie : « Je n'arrivais pas à courir plus de 20 minutes. Courir dans une montée, c'était impossible. J'avais un gros problème neurologique. » Il consulte des médecins français. Ils haussent les épaules : fatigue psychologique. C'est commode. Quand on marche droit, les gens vous croient en bonne santé. « Comme je suis sportif, j'ai une bonne hygiène de vie, je peux toujours marcher, courir à petite dose, on ne se dit pas que je suis affecté. C'est le cas de beaucoup de malades. À moins qu'on soit en fauteuil roulant et qu'on n'arrive pas à marcher, on ne nous croit pas. » Alors il parle. Enfin. Il décide de raconter, de mettre un gros coup de pied dans la fourmilière. « La persistance de la Borrelia (la bactérie à l'origine de la maladie de Lyme) est reconnue aux États-Unis et en Allemagne. Là-bas, les traitements sont au point. Pourquoi pas ici ? Pourquoi ne prend-on pas nos souffrances au sérieux ? » Documentaire L'Equipe Explore : Les naufragés d'Angolon Désabusé, il traverse la frontière. En novembre 2023, direction la clinique Alviasana, à Augsbourg (Allemagne). Là-bas, il suit un protocole de soins combinant trois antibiotiques et de la phytothérapie. Une trithérapie. « Nous traitons non seulement l'infection, mais aussi l'inflammation et le système immunitaire, détaille le Docteur Sigrid Blehle, directrice de la clinique. Cela comprend par exemple aussi la thérapie des mitochondries, afin de traiter la fatigue et l'épuisement chroniques généralement présents. Notre thérapie est globale et combine la médecine classique et la naturopathie. » « Le conventionnel est quand même efficace », concède l'ultra-trailer. « Maintenant, par expérience, je me dis que c'est l'association des traitements naturels et conventionnels qui fonctionne le mieux contre cette maladie. » « Notre décision de le soutenir dans son combat contre la maladie de Lyme témoigne de notre confiance en son courage inébranlable, son esprit humain et son retour à la compétition. » Maxine Hünerwadel, responsable chez On Running Selon le sportif, ce mélange lui aurait permis de revivre. Pas encore la vie d'avant, pas encore d'ultra, mais une vie, déjà. En attendant, il continue de s'engager pour la planète. Il anime des fresques du climat une fois par mois, tente d'éveiller les consciences. Son traitement à un coût important (20 000 euros), supporté en partie par ses sponsors. « Notre décision de le soutenir dans son combat contre la maladie de Lyme témoigne de notre confiance en son courage inébranlable, son esprit humain et son retour à la compétition », explique Maxine Hünerwadel, responsable chez On Running. « On n'allait pas le lâcher parce qu'il était moins performant, explique Lucie Lacroix, en charge des partenariats athlètes du fabriquant jurassien de lunettes Julbo. On ne peut pas ''utiliser'' un sportif quand il marche bien et le lâcher à la moindre contrariété. En plus, Xavier est un enfant du pays, il porte de belles valeurs : il est attaché à la région, à son terroir, à la nature. » Aujourd'hui, pas d'exploit mais du courage Même son de cloche chez Baouw, autre sponsor à la fidélité sans faille : « Il nous semblait naturel de continuer à l'accompagner, même dans une période plus difficile pour lui, assure Nicolas Hays. Nous avons simplement adapté notre approche en mettant de côté la performance pure, au profit de ses stages et de son engagement RSE. » Moniteur de ski de fond en hiver, il encadre des stages de trail dans ses montagnes jurassiennes, au retour des beaux jours, 40 kilomètres, deux ou trois jours. Il gambade à un rythme tranquille. Loin du surhomme d'avant. En mai dernier, il a participé au Trail des Forts de Besançon, 42 kilomètres et 1300 km de dénivelé positif, et terminé à 1 h 30 du vainqueur. « J'étais en mode balade avec des copains. Je ne me suis pas rentré dedans. Je n'ai pas l'autorisation de toute façon. » Pas d'exploit, mais du courage. Le public l'a reconnu. Et l'a encouragé, avec force. « Même si je n'ai jamais cherché à me mettre en avant, ça m'a vraiment fait plaisir. Les gens étaient hyperbienveillants, sympas avec moi tout au long du parcours. C'était beaucoup d'émotions. C'était à la fois hyperplaisant et hyperdur. J'ai tellement envie de revenir sur une course et de refaire un ultra. » « J'espère que ça va se terminer un jour, cette histoire, parce que je ronge mon frein, confie-t-il. J'ai traversé des moments tellement compliqués, avec le moral au plus bas... » À date, son retour au plus haut niveau n'est pas encore possible. « Cette perspective existe », assure le Dr Blehle. « Il est encore assez jeune pour y arriver, je suis un bon exemple », glisse Pommeret, vainqueur à 49 ans de la Hardrock 100 en juillet pour la deuxième année de suite. « Je ferais tout pour me débarrasser de cette maladie, quitte à aller me faire soigner aux États-Unis », affirme Thévenard. Le combat continue.



